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FÊTES ET TRADITIONS


Sacha Tchourakova

Tourisme sauvage en Russie


Pour pratiquer ce genre de loisir, il faut d'abord se munir d'une carte précise (à l'échelle de 2 kilomètres de préférence; beaucoup de cartes militaires jadis secrètes sont actuellement en vente) de l'endroit où vous comptez aller, et être sûr qu'à la fin de votre voyage vous pourrez prendre un avion, un train, un hélicoptère etc. pour retourner dans le monde civilisé. La Russie regorge d'endroits sauvages et inhabités!

Il est très utile d'avoir de la vodka afin de l'utiliser comme moyen de paiement pour la population locale, car elle souvent rare, et l'argent a moins de valeur que dans les villes.

On va parler de la Carélie.

Si vous êtes intéressés par le tourisme fluvial, la Carélie est un endroit idéal. Elle possède une grande quantité de petites rivières qui se jettent dans la Mer Blanche, et de petits et grands lacs. C'est une région très pittoresque. Les rives des lacs sont caillouteuses, tout comme le fond. Il n'est pas très pratique de s'y baigner, parce qu'il faut marcher pieds nus sur les cailloux pointus et glissants, et c'est dangereux. Il n'y a pas d'humus, seulement d'énormes blocs de pierre couverts de mousse blanche et de lichens. Parfois il est difficile de fixer la tente faute de trouver un emplacement sans pierres pour enfoncer les piquets. Le seul gros inconvénient, ce sont les moustiques et les moucherons. Les moucherons sont plus pénibles parce qu'ils sont petits, ils passent partout, piquent fort et attaquent en groupe. Dans certains endroits marécageux ils est impossible de manger de la soupe sans une bonne quantité de moucherons dedans!

Cependant, on peut y remédier. Premièrement, en utilisant diverses crèmes et des aérosols répulsifs. Deuxièmement, il faut installer la tente sur des îles et de hautes rives, où le vent chasse immédiatement les moustiques et les moucherons. La fumée du feu aide aussi, mais elle irrite les yeux...

Nous voyageons sur deux catamarans gonflables. L'un est acheté au magasin, et l'autre cousu main. Celui qu'on a confectionné nous-même a un défaut: sa couture se trouve en bas, et elle se défait souvent quand le catamaran racle le fond.

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Comment construire un catamaran? Sa carcasse est montée avec des piquets de bouleau attachés ensemble pour former une grille; cette grille est fixée ensuite aux boudins. Cet esquif peut porter quatre à six personnes avec leurs sacs à dos, ça dépend de sa taille.

Il faut faire très attention en passant les rapides: ils sont dangereux. Si le kayak se retourne, l'eau vous plaque sur les cailloux, et il est difficile de se dégager. Parfois il y a des victimes, comme la jeune femme qui s'est noyée il n'y a pas très longtemps. Le corps a été retrouvé un mois plus tard et sorti de l'eau à l'aide de grappins.

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Les tentes sont souvent fabriquées maison, c'est l'une des particularités du tourisme russe. Les passionnés fabriquent tout: tentes, catamarans, sacs à dos, malgré le fait qu'on peut trouver ces articles de bonne qualité en abondance au magasin. Mais l'habitude de confectionner l'équipement remonte à la nuit des temps, quand les rayons des magasins étaient pleins de vide.

 

Nourriture

Les touristes russes emportent au moins deux chaudrons - pour la soupe et pour le plat principal. Il ne faut pas oublier une scie et une hache pour faire du feu!

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En premier lieu, la viande en conserve (touchonka)! Deux boîtes par jour pour un groupe de 6-8 personnes. Le choix de la touchonka doit être minutieux, jusqu'à ouvrir les boîtes et vérifier si elles contiennent effectivement de la viande et non du gras assaisonné. Ensuite des céréales selon le goût: blé, sarrasin, semoule de blé, millet... On en fait cuire des bouillies le matin (beurk!).  Des soupes en sachet et du bouillon en cubes.  Des sucettes, des biscottes de farine de blé et de seigle (pour consommer quand il n'y a plus de pain). Fromage, saucisson, pâté (un peu de luxe).  Nous amenons aussi de la mayonnaise pour les brochettes de... brochet, et l'huile de tournesol pour faire cuire les crêpes et le poisson.

Les biscuits secs (du genre "Petit beurre") peuvent se transformer en une véritable friandise: il faut les émietter, mélanger avec du lait concentré sucré et des baies de la forêt (par exemple, des myrtilles), étaler cette masse, la rouler, l'envelopper dans du plastique et la plonger dans l'eau froide. Une fois ce gâteau improvisé durci, on peut le manger, c'est très bon et très calorique.

Les boissons en poudre aromatisées aux fruits changent des sempiternels thé et café. En passant par les villages, on peut acheter du lait, et c'est vraiment délicieux après plusieurs jours de privations!

Les amateurs emmènent l'alcool à 96° qui se vend en pharmacie sous l'appellation "solution médicale antiseptique". Ensuite il est dilué aux proportions voulues et consommé pour se réchauffer après le passage des rapides, quand on est tous mouillés, surtout au-dessous de la ceinture. On peut ne pas diluer, question de goût!

On peut se nourrir aussi de la pêche et de la cueillette. C'est d'abord le poisson qu'on prépare cuit, salé, en brochettes, à la mayonnaise etc., selon ses préférences. Les brochettes du... brochet sont délicieuses, surtout si on utilise les piques faites main - les branches sculptées à la main!

On peut manger les champignons à condition d'en trouver; ils sont d'habitude poêlés avec des pommes de terre. On trouve surtout des bolets raboteux. Ils sont très pittoresques avec leurs chapeaux orange sur la mousse profonde sous les grands sapins!

Les baies: myrtilles, airelles, qui deviennent mûres vers la fin de juillet ou début août. Dans certaines clairières, on peut en trouver facilement jusqu'à cinq litres en une fois et ramener à la maison.

 

Pêche

Ce n'est pas le but principal, mais seuls les flemmards ne pêchent pas, parce qu'elle prend très bien. Les poissons les plus répandus sont le brochet, la perche, le gardon, l'ide, parfois la truite, et si on a de la chance, on peut attraper des poissons cartilagineux.

Les brochets se trouvent souvent parmi les pierres et les algues dans les basses eaux et aussi après les rapides, où le courant pousse les petits poissons. Les perches aussi se ressemblent en banc après les rapides.Dans la Mer Blanche, on attrape les chabots piquant comme les perches, le cabillaud, la sole. Ceux qui s'y connaissent arrivent à attraper le saumon et ses semblables.Les vers sont extrêmement rares en Carélie, il faut en apporter avec soi. Plein de vers sont dans le fumier à la datcha!

La population locale manque d'accessoires de pêche. Les gens sont très contents quand on leur offre du filin ou des leurres. Le plus apprécié se présente sous forme d'un petit poisson luminescent qui ressemble à un vrai, avec la queue mobile, très efficace pour attraper le brochet et la perche et idéal pour les femmes qui répugnent à toucher les vers!

 

Bains dans la nature

Une activité très utile, répandue et joyeuse du tourisme sauvage. Pour construire les bains, il faut d'abord confectionner un four à l'aide de grosses pierres, où on maintient le feu pendant 6 à 8 heures. Quand le four est suffisamment chaud, on construit une cabane autour: d'abord la carcasse avec les pieux, ensuite le plastique ou la soie à parachutes tendue sur la carcasse. Le sol est couvert de branches de bouleau, et un tronc d'arbre assez épais sert de banc. Les bains sont prêts! Tout le monde se déshabille, prend de l'eau chaude et froide et va se laver. L'eau froide se verse sur les pierres chaudes pour créer de la vapeur, et les branches de bouleau exhalent une délicieuse odeur acidulée. A l'intérieur des bains il fait très chaud, quelle que soit la température extérieure. Quand il devient difficile de respirer, on sort pour se jeter dans le lac froid et après,  frigorifié, on retourne dans les bains pour se réchauffer, plusieurs fois de suite.

Après le bain, tout le monde est rose comme des petits cochons, propre et content!

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Mer Blanche

Elle est dangereuse, comme toutes les mers du nord. L'eau est très froide, et il vaut mieux de ne pas prendre le risque de se baigner. Les Pomors (1) racontent beaucoup d'histoires sur ceux qui ont péri en se retrouvant dan l'eau glacée.

Les touristes se promènent sur la mer en catamarans et en kayaks, sans trop s'éloigner du rivage. Souvent, il est plus facile d'aller d'un village à l'autre par la mer qu'en voiture: les routes caréliennes sont dans un état déplorable, c'est juste du sable mélangé aux cailloux.

 

Santé

D'habitude on revient de la Carélie bronzé comme si on venait du sud. Les jours ensoleillés, on s'expose sans le faire exprès, à cause de la réverbération qui peut donner des coups de soleil. Le grand air, les effort physiques, la communion avec la nature sauvage, le calme, la beauté des paysages apportent la paix et l'harmonie intérieure. Sans parler du plaisir de passer le temps en compagnie d'amis, les aventures, la pêche donnent la pêche pour toute l'année à venir!

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Conclusion

En se retrouvant dans des conditions aussi sauvages, on commence à se rendre compte à quel point on est gâté et dépendants de la civilisation. On manque de routes goudronnés, de fast-foods et tout simplement d'eau chaude... On se sent vulnérable comme un ordinateur: d'un côté, c'est un miracle de la technologie moderne avec un potentiel incroyable, de l'autre côté - ce miracle n'existe pas sans une prise de courant.

Et c'est pour ça qu'on est tout fier d'avoir réussi à couper du bois, préparer un dîner sur le feu, se nourrir avec les fruits de la nature.

En randonnée, on regarde souvent le ciel, on voit sa beauté au lever et au coucher du soleil; en ville, on regarde tout - les panneaux publicitaires, les vitrines avec les soldes - tout sauf le ciel

Mais... je ne pourrais pas abandonner la civilisation et aller vivre dans la forêt. On se sent si inconfortable sans la souris informatique!..

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1. Habitants de la région côtière du nord.