Bylines
Feuille Bylines
Bylines
Feuille Bylines

Ilia Mouromets
et Soloveï le brigand

Ilia Mouromets

De la ville de Mourom,
du bourg de Karatchirovo
sortit un hardi bon gros garçon ;
il avait assisté aux matines de Mourom
et pour la messe il voulait arriver à la capitale de Kiev,
et il approchait de la ville fameuse de Tchernigov.
Auprès de cette ville de Tchernigov
étaient parqués des soldats, c’en était tout noir,
personne à pied n’aurait pu traverser,
sur son bon cheval, personne n’aurait pu passer,
le noir corbeau ne pouvait y voler,
la bête grise ne pouvait y galoper,
Et quand il approcha de cette grande armée,
il se mit à fouler cette grande armée aux pieds de son cheval,
il se mit à la piquer de sa lance,
et il tua toute cette grande armée.
Comme il approchait de la ville fameuse de Tchernigov,
les moujiks tchernigoviens alors sortirent
et ouvrirent les portes de Tchernigov
et l’appelèrent dans Tchernigov comme voïvode
Et Ilia leur dit ces paroles :
"Eh ! Vous, moujiks de Tchernigov !
je n’irai pas chez vous, à Tchernigov, comme voïvode
Montrez-moi la route directe,
la route directe de la ville capitale de Kiev".
Les moujiks de Tchernigov lui dirent :
"Eh ! hardi bon gros garçon,
illustre bogatyr saint-russien !
La route directe est garnie de troncs d’arbres,
garnie de troncs d’arbres, de mottes de gazon,
par cette route directe
personne à pied ne peut aller,
sur son bon cheval, personne ne peut passe :
et au lieu les Boues Noires,
auprès d’un bouleau aux branches tombantes,
auprès de la rivière Smorodina,
auprès de la croix de Lévanide,
est perché Soloveï le brigand sur un chêne humide,
est perché Soloveï le brigand fils d’Odikhmant
et là Soloveï siffle comme un rossignol,
il crie, le malfaiteur brigand, comme une bête,
et par suite de son sifflement de rossignol,
par suite de son cri de bête sauvage,
toutes les herbes, les gazons décampent,
toutes les fleurs d’azur s’éparpillent,
les forêts sombres toutes se penchent sur la terre,
et les hommes, tant qu’ils sont, sont tous étendus morts.
Par la route directe il y a cinq cent verstes,
et par le chemin détourné en tout mille."
Il lâcha son bon cheval de bogatyr,
il chevaucha par la route directe.
Son bon cheval de bogatyr
se mit à galoper de monts en monts,
se mit à enjamber collines et collines,
il sème entre ses jambes petites rivières et lacs.
Il arrive à la rivière Smorodina,
au lieu dit la Boue Noire,
au bouleau aux branches tombantes,
vers la fameuse croix de Lévanide.

Ilia Mouromets

Soloveï siffla comme un rossignol,
le malfaiteur brigand cria comme une bête,
alors toutes les herbes, les gazons décampèrent,
et les fleurs d’azur s’éparpillèrent,
les forêts sombres se penchèrent à terre.
Son bon cheval de bogatyr
bronche sur une racine ;
alors le vieux cosaque Ilia Mouromets
prend dans sa main son fouet de soie,
et frappe son cheval aux cuisses grasses ;
et Ilia dit ces paroles :
"Eh ! viande à loups, sac à herbes !
ne veux-tu plus marcher ou ne peux-tu plus me porter ?
que tu bronches, chien, sur une racine ?
N’as-tu jamais entendu siffler un rossignol,
N’as tu jamais entendu crier une bête,
n’as tu donc jamais vu de lutte de bogatyrs ?"
Et alors le vieux cosaque Ilia Mouromets
prend son arc dur, à la forte détente,
il le prend dans ses blanches mains,
il tendit la corde de soie,
et il placa la flèche durcie au feu,
et la lâcha sur Soloveï le brigand,
il lui creva l'œil droit avec la tempe.
Et il fit tomber Soloveï sur la terre humide,
et il l’attacha à son étrier d’acier de droite,
et l’emmena dans la fameuse rase campagne,
il l’emmena auprès du lit de Soloveï.
Dans ce nid de Soloveï
se trouvaient ses trois filles, trois filles chéries ;
la fille aînée regarde à la fenêtre à linteaux,
et elle dit ces paroles :
"Notre père chevauche en rase campagne,
il monte son bon cheval,
et il amène un paysan villageois,
enchaîné a son étrier de droite."
Sa seconde fille chérie regarda
et elle dit ces paroles :
"Le père chevauche en rase campagne
et il amène un paysan villageois,
enchaîné à son étrier de droite."
Sa plus jeune fille chérie regarda
et elle dit ces paroles :
"C’est un paysan villageois qui chevauche,
et le paysan est en selle sur son bon cheval,
et il amène notre père à son étrier,
enchaîné à son étrier d’acier,
son œil droit est crevé avec la tempe."
Et alors elle dit ces paroles :
"Eh ! nos hommes chéris !
prenez donc vos épieux à bêtes,
courez donc en rase campagne
et frappez le paysan villageois."
Et leurs hommes chéris,
les gendres de Soloveï,
saisirent alors des épieux à bêtes
et coururent en rase campagne
vers ce paysan villageois,
et veulent tuer ce paysan villageois.
Soloveï le brigand, fils d’Odikhmant, leur dit :
"Eh ! mes gendres chéris !
jetez donc vos épieux à bêtes,
et appelez le paysan villageois,
appelez-le dans mon lit de Soloveï,
et rassasiez-le de mets doux comme sucre,
abreuvez-le de boissons de miel,
et donnez-lui des cadeaux précieux."
Les gendres de Soloveï
jetèrent leurs épieux à bêtes
et ils appellent le paysan villageois
dans le nid de Soloveï ;
mais le paysan villageois n’écoute pas,
et il chevauche en rase campagne,
en ligne droite vers la ville capitale de Kiev.
Il arrive à la ville capitale de Kiev,
chez le fameux prince dans la vaste cour .
Alors le prince Vladimir sortait de l’église de Dieu,
il arriva au palais à pierres blanches
dans sa salle à manger,
ils s’assirent pour manger, boire et goûter le pain,
goûter le pain et dîner.
Et alors le vieux cosaque Ilia Mouromets
arrêta son cheval au milieu de la cour,
et entra lui-même au palais à pierres blanches,
il passe dans la salle à manger,
il ouvre la porte au large, sur ses gonds,
il fait le signe de croix comme on le prescrit,
il fait les prosternations comme on les enseigne,
il s’incline bas dans toutes les quatre directions
et vers le prince Vladimir particulièrement,
puis vers tous les princes apanagés.
Alors le prince Vladimir se mit à interroger le gars :
"Dis-moi donc, d’où es-tu, gros bon garçon,
comment t’appelle-t-on de ton nom,
et comment te nomme-t-on d’après ton père ?"
Le vieux cosaque Ilia Mouromets dit :
"Je suis de la fameuse ville de Mourom,
du bourg de Karatchirovo,
je suis le vieux cosaque Ilia Mouromets,
Ilia Mouromets fils d’Ivan."
Vladimir lui dit ces paroles :
"Eh ! vieux cosaque Ilia Mouromets,
et y a-t-il longtemps que tu es parti de Mourom
et par quelle route es-tu venu à Kiev-capitale ?"
Ilia dit ces paroles :
"Eh ! toi, fameux Vladimir de Kiev capitale !
j’ai assisté aux matines de Pâques à Mourom,
et j’ai voulu arriver pour la messe à Kiev capitale,
et j’ai été retardé en chemin ;
et j’ai passé par la route directe,
par la route directe, j’ai passé près de Tchernigov,
j’ai passé près de la Boue Noire,
près de la fameuse rivière Smorodina,
près du fameux bouleau qui penche,
près de la fameuse croix de Lévanide."
Vladimir lui dit ces paroles :
"Eh ! paysan villageois,
en face, moujik, tu mens,
en face, moujik, tu te moques !
Mais sous la fameuse ville de Tchernigov
est parquée une très nombreuse armée,
là à pied personne ne peut aller,
là sur un bon cheval, personne ne peut passer,
par là la bête grise ne trotte plus ;
le noir corbeau ne vole plus ;
et au lieu de la Boue Noire,
près de la rivière Smorodina,
près du bouleau aux branches qui pendent,
auprès de la croix de Lévanide,
est perché Soloveï le brigand, fils d’Odikhmant,
et quand Soloveï siffle comme rossignol,
quand le malfaiteur brigand crie comme bête,
toutes les herbes, les gazons décampent,
les fleurs d’azur s'éparpillent au loin,
les forêts sombres s’inclinent vers la terre,
et les hommes, tant qu’ils sont tous, sont étendus morts."
Ilia lui dit ces paroles :
"Vladimir, prince de Kiev capitale !
Soloveï le brigand est dans ta cour,
il a l'œil crevé avec la tempe,
et il est enchaîné à l’étrier d’acier."
Alors Vladimir, prince de Kiev capitale,
bien vite se leva sur ses jambes fringantes,
il jeta sur une épaule sa pelisse de martre,
sur une oreille son bonnet de zibeline,
il sortit dans sa large cour
pour voir Soloveï le brigand.
Le prince Vladimir lui dit ces paroles :
"Siffle donc, Soloveï, comme rossignol,
crie donc, chien, comme bête sauvage."
Soloveï le brigand fils d’Odikhmant lui dit :
"Ce n’est pas chez vous, prince, aujourd’hui que je dîne,
aussi ce n’est pas vous que je veux écouter,
je dîne chez le vieux cosaque Ilia Mouromets,
c’est lui que je veux écouter."
Vladimir prince de Kiev capitale dit :
"Eh ! vieux cosaque Ilia Mouromets !
ordonne à Soloveï de siffler comme rossignol,
ordonne-lui de crier comme bête."
Ilia dit ces paroles :
"Eh ! Soloveï le brigand fils d’Odikhmant !
siffle un demi-sifflet de rossignol,
crie un demi-cri de bête sauvage."
Soloveï le brigand fils d’Odikhmant lui dit :
"Eh ! vieux cosaque Ilia Mouromets !
mes blessures sanglantes sont coagulées,
mes lèvres sucrées ne fonctionnent plus,
je ne peux pas siffler comme rossignol,
je ne peux pas crier comme bête sauvage.
Ordonne donc au prince Vladimir
de me verser une tasse de vin d’herbes,
quand j’aurai bu la tasse de vin d’herbes,
mes blessures sanglantes s’ouvriront,
et mes lèvres sucrées marcheront,
alors je sifflerai comme rossignol,
alors je crierai comme bête sauvage."
Ilia dit au prince Vladimir :
"Vladimir, prince de Kiev capitale !
va donc dans ta salle à manger,
verse donc une tasse de vin d’herbes,
pas un petit gobelet, mais un védro et demi,
apporte-le donc à Soloveï le brigand."
Alors Vladimir, prince de Kiev capitale,
vite alla dans sa salle à manger,
versa une tasse de vin d’herbes,
pas un petit gobelet, mais un védro et demi,
le mêla à du miel incorruptible,
et il l’apporta à Soloveï le brigand, fils d’Odikhmant
Soloveï le brigand, fils d’Odikhmant
reçut la tasse du prince d’une main,
Soloveï but la tasse d’une seule lampée ;
alors Soloveï siffla comme rossignol,
le brigand cria comme bête sauvage ;
les coupoles sur les térems se faussèrent,
et les vitres aux térems s’éparpillèrent
à la suite de ce sifflet de rossignol,
et les gens, tant qu’ils sont, sont tous étendus morts ;
et Vladimir, prince de Kiev capitale,
se couvre de sa pelisse de martre.
Et alors le vieux cosaque Ilia Mouromets
bien vite monta son beau cheval,
et emmena Soloveï en rase campagne,
et il lui trancha sa tête misérable.
Et Ilia dit ces paroles :
"Tu cesseras donc de siffler comme rossignol,
tu cesseras donc de crier comme bête sauvage,
tu cesseras donc de mettre en larmes les pères et les mères,
tu cesseras donc de rendre veuves les jeunes femmes,
tu cesseras donc de rendre errants et orphelins les petits enfants."
Alors pour Soloveï on chante gloire,
on chante gloire dans les siècles des siècles.


Version russe

Mythes

AccueilContesBylines


© Russie virtuelle